Vote de confiance sous la 5e République : Qui y a eu recours ? Combien de fois ? Y a-t-il eu des échecs ?

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Jean Castex est le dernier Premier ministre a avoir eu recours au vote de confiance, le 15 juillet 2020.
Jean Castex est le dernier Premier ministre a avoir eu recours au vote de confiance, le 15 juillet 2020.
par Anne-Charlotte Dusseaulx, le Vendredi 5 septembre 2025 à 10:05, mis à jour le Vendredi 5 septembre 2025 à 11:50

Ce lundi 8 septembre, François Bayrou va soumettre l'existence de son gouvernement au résultat du vote de confiance qu'il a décidé de demander à l'Assemblée nationale. Tout indique qu'une majorité de députés refusera d'accorder la confiance au Premier ministre. Est-ce déjà arrivé depuis le début de la Ve République ? Combien y a-t-il eu de votes de confiance ? Quels sont les chefs de gouvernement qui y ont eu recours... ou pas ? LCP revient sur l'histoire de ce scrutin.

Lundi 25 août, l'annonce a suscité des réactions entre surprise et stupéfaction. Ce jour-là, François Bayrou a fait le choix d'engager la responsabilité de son gouvernement sur la question de la dette lors d'un vote qui aura lieu, ce lundi 8 septembre, à l'Assemblée nationale. "J'ai mis le sort du gouvernement en jeu pour que tout le monde se rende compte de la situation, pour qu'on ouvre les yeux" sur la situation budgétaire de la France, a justifié le Premier ministre sur BFMTV la semaine dernière. Celui qui n'avait pas eu recours à un tel vote en janvier à la suite de sa déclaration de politique générale joue gros et pourrait être amené à démissionner dans la foulée de Matignon, en cas de résultat défavorable. En effet, s'il n'obtient pas la majorité - ce qui semble plus que probable - son gouvernement chutera. 

Ce scénario s'est-il déjà produit sous la Ve République ? A quand remonte le dernier vote de confiance ? A cette occasion, LCP revient sur l'histoire de cette procédure prévue par la Constitution.

Chuter sur un tel vote serait une première 

Depuis 1958, 41 votes de confiance (article 49 alinéa 1 de la Constitution) ont été organisés. Ils ont impliqué 22 Premiers ministres différents. Or, jusqu'à présent, aucun gouvernement de la Ve République n'est tombé à cause d'un vote de confiance rejeté. En effet, tous les exécutifs ayant demandé la confiance de l'Assemblée nationale l'ont obtenue. A ceci près que les gouvernements concernés pouvaient tous compter sur une majorité confortable – et souvent absolue – au Palais-Bourbon. Ce qui est loin d'être le cas de celui de François Bayrou.

Le dernier vote de confiance remonte à 2020

Le dernier Premier ministre à avoir eu recours à un vote de confiance, dans la foulée de sa déclaration de politique générale, fut Jean Castex en juillet 2020. Face à une Assemblée nationale fragmentée, aucun de ses successeurs ne s'y était risqué : ni Elisabeth Borne en 2022, ni Gabriel Attal en 2024, ni Michel Barnier la même année. 

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Avant Jean Castex, Edouard Philippe s'y était également soumis à deux reprises, en 2017 (370 voix pour, 67 contre et 129 abstentions) et en 2019 (363 voix pour, 163 contre et 47 abstentions).

Par le passé, d'autres Premiers ministres n'y ont pas eu recours

Si le recours au vote de confiance n'a rien d'inédit, plusieurs chefs de gouvernement avaient choisi, avant même l'arrivée à l'Elysée d'Emmanuel Macron, de ne pas engager leur responsabilité par un vote lors de leur déclaration de politique générale. Avant Elisabeth Borne en 2022, ils avaient été sept à se passer de cette étape au moins une fois pendant leur bail à Matignon : Georges Pompidou en 1966, Maurice Couve de Murville en 1968, Pierre Messmer en 1972, Raymond Barre en 1976, Michel Rocard en 1988, Edith Cresson en 1991 et Pierre Bérégovoy en 1992.

Certains ont sollicité la confiance sur des sujets précis

Ce lundi 8 septembre, François Bayrou entend parler du poids de la dette. Avant lui, d'autres sujets avaient aussi fait l'objet d'un vote de confiance. Premier ministre de François Mitterrand entre 1981 et 1984, Pierre Mauroy utilise l'article 49.1 à cinq reprises, – c'est celui qui en a le plus usé –, dont deux fois sur des programmes spécifiques : le programme énergétique (octobre 1981) et le programme économique (juin 1982). Il dispose d’une large majorité absolue et obtient, à chaque fois, la confiance des députés. 

Dix ans plus tard, Pierre Bérégovoy, lui aussi Premier ministre du président socialiste, engage sa responsabilité sur un point précis : les négociations du GATT (Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce). En séance, il l'assure : "Ceux qui voteront 'pour' ne seront en aucun cas présumés soutenir la politique générale du gouvernement." Il obtient la confiance avec 301 voix pour, 251 contre et 6 abstentions.

D'autres Premiers ministres ont demandé la confiance des députés sur des sujets spécifiques : Michel Rocard, en 1988, sur la politique au Moyen-Orient, Edouard Balladur, une fois encore sur les négociations du GATT ou encore Alain Juppé, en novembre 1995, sur une réforme sociale majeure : celle de la sécurité sociale. Malgré l'approbation de l'Assemblée, il échoue face à la mobilisation de la rue et des manifestations historiques. Enfin, François Fillon utilise l’article 49.1, en 2009, sur la politique étrangère de la France. A chaque fois, ces Premiers ministres obtiennent la confiance grâce à une majorité au Palais-Bourbon.

Jacques Chirac en 1986, le vote de confiance le plus serré 

Le 9 avril 1986, la confiance est accordée à Jacques Chirac, alors Premier ministre – de cohabitation – de François Mitterrand, avec seulement 7 voix d'écart (292 pour, 285 contre). C'est le vote de confiance le plus serré de la Ve République. Une année plus tard, le 7 avril 1987, Jacques Chirac emporte le vote avec, cette fois, 12 voix d'écart (294 pour et 282 contre). Ce sera 13 voix d'écart le 3 décembre 1987 lors d'un nouveau scrutin sous tension.

Plus récemment, le 16 septembre 2014, Manuel Valls, Premier ministre de François Hollande, avait également fait face à un vote de confiance serré. Elle lui sera accordée à seulement 25 voix, alors que le Parti socialiste dispose à lui seul de la majorité absolue à l'Assemblée nationale : 269 voix pour, 244 contre et 53 abstentions (dont 31 chez les socialistes).