Les députés ont adopté, ce jeudi 19 juin, l'article relatif aux objectifs de production et de consommation en matière d'énergies renouvelables prévus par la proposition de loi de programmation énergétique. Contrairement au nucléaire, dont la relance massive a été approuvée la veille, le texte s'en tient à un objectif global concernant les renouvelables. La gauche dénonce un manque d'ambition.
Au lendemain de débats parfois électriques dans l'hémicycle, les députés se sont de nouveau livrés à des discussions particulièrement animées sur la proposition de loi de programmation énergétique, dite "Gremillet", du nom du sénateur à l'initiative du texte. Après avoir approuvé, mercredi 18 juin, la relance massive du nucléaire prévue par l'article 3, les élus ont adopté ce jeudi l'article 5, relatif aux objectifs de production et de consommation en matière d'énergies renouvelables, au terme de débats étalés sur deux jours.
L'Assemblée nationale a finalement opté, comme le souhaitait le gouvernement et le rapporteur du texte, Antoine Armand (Ensemble pour la République), pour un objectif global de production visant à "porter la part d’énergie décarbonée à 58 % au moins de la consommation finale brute d’énergie en 2030", ce qui comprend également l'énergie nucléaire. A cette date, le texte prévoit un objectif de production d'au moins 560 térawattheures issue de l'énergie décarbonée, dont "au moins 200 térawattheures issus de sources renouvelables" : éolien, photovoltaïque, géothermique, énergie hydroélectrique, marémotrice, etc.
Le reste de l'article, qui prévoyait de rentrer davantage dans le détail des objectifs en fonction de chacune des énergies, a été supprimé via un amendement d'Antoine Armand. "Les objectifs spécifiques sont à fixer au niveau d'un décret. (...) Si cette Assemblée devait se prononcer sur chaque amendement, objectif énergétique après objectif énergétique, non seulement nous n'arriverions pas à un résultat satisfaisant, mais en plus ce résultat serait probablement contradictoire", a plaidé le rapporteur. Une argumentation soutenue par le ministre chargé de l'Industrie et de l'Energie, Marc Ferracci : "Inscrire dans la loi des objectifs quantifiés sur l'ensemble des filières d'énergies renouvelables n'est pas un bon principe. (...) Il faut garder la possibilité d'ajuster ces objectifs en fonction de l'évolution des techniques industrielles, de la consommation."
Ce choix de parler d'énergie "décarbonée", comme d'en rester à un objectif global, a hérissé les groupes de gauche, qui ont jugé que le signal envoyé aux 100 000 emplois des filières du renouvelable était particulièrement néfaste. "En mettant dans un même paquet énergie nucléaire et renouvelable, vous renoncez à toute ambition pour les énergies renouvelables", s'est inquiété Karim Benbrahim (Socialistes). Et d'ajouter : "Vous dites que vous voulez avancer sur deux jambes, la jambe nucléaire et la jambe renouvelable. Alors pourquoi vous renoncez à inscrire tout objectif en matière d'énergies renouvelables ?"
"Dans tous les scénarios de RTE [le gestionnaire du réseau électrique], même dans le super scénario hyper nucléarisé, il faut une augmentation par sept des énergies renouvelables d'ici 2050", a pointé Aurélie Trouvé (La France insoumise), qui a déploré un sous-dimensionnement du développement des énergies renouvelables. "Vos prises de position sont totalement indignes sur les énergies renouvelables", a renchéri Julie Laernoes (Ecologiste et social), qui s'en est pris à Marc Ferracci, "ministre de l'inaction".
L'amendement du rapporteur a finalement été approuvé avec les voix des Républicains et du Rassemblement national. "On n'est pas là pour défendre l'industrie chinoise ou allemande. On est là pour défendre les Français", a justifié Kevin Mauvieux (RN), agacé des "leçons" données par la gauche. "Le RN refuse qu'il y ait des objectifs d'énergies renouvelables intermittentes", a appuyé son collègue Maxime Amblard. Ainsi modifié, l'article 5 a été adopté avec l'abstention des groupes de gauche, opposés à la tournure des événements, mais aussi d'une large majorité des élus du groupe présidé par Marine Le Pen, qui ont refusé de voter pour un article évoquant le développement d'énergies "intermittentes" (détail du scrutin à consulter ici).
Les débats se poursuivront ce jeudi après-midi, Les Républicains et le Rassemblement national souhaitant aller plus loin en votant des moratoires en matière d'éolien et de photovoltaïque. Au terme de l'examen de la proposition de loi, prévu vendredi, un vote solennel sur l'ensemble du texte doit avoir lieu mardi prochain, le 24 juin.