Au lendemain de la nomination de Sébastien Lecornu à Matignon, les oppositions - toutes très critiques - ont cependant réagi en ordre dispersé sur la question d'une éventuelle censure immédiate du prochain gouvernement. La France insoumise promet le dépôt d'une motion si le nouveau Premier ministre ne se plie pas à un vote de confiance, tandis que le Parti socialiste et le Rassemblement national demandent un changement de politique et veulent juger Sébastien Lecornu à l'épreuve des faits.
Il suffisait d'écouter les déclarations des uns et des autres dans les médias, ce mercredi 10 septembre, pour comprendre à quel point la tâche de Sébastien Lecornu, tout juste nommé Premier ministre, sera difficile. Parviendra-t-il à ne pas être censuré ? Ce qui supposerait pour le moins d'infléchir la politique menée par Emmanuel Macron depuis 2017, alors même que le nouveau locataire de Matignon est un fidèle du chef de l'Etat ?
Le coordinateur national de La France insoumise, Manuel Bompard, n'y croit pas du tout. "Ça fait maintenant à deux reprises que l'Assemblée nationale a censuré ses gouvernements {ceux d'Emmanuel Macron] et il continue dans la même direction", a réagi le député sur BFMTV, qui annonce le dépôt d'une motion de censure dite "spontanée" (article 49.2 de la Constitution), si Sébastien Lecornu ne demande pas un vote de confiance à l'Assemblée nationale.
Le groupe de LFI a, par ailleurs, d'ores et déjà déposé une proposition de résolution visant à engager une procédure de destitution d'Emmanuel Macron.
Sans grande illusion, le Parti socialiste - qui sera au coeur de la négociation qu'essaiera de mettre en œuvre Sébastien Lecornu pour obtenir un accord sur le budget - attend de voir. "Ça fait huit ans qu'il est ministre d'Emmanuel Macron, il est ministre d'un gouvernement qui a été renversé lundi, comprenez le scepticisme qui peut être le nôtre", a justifié sur RTL le président du groupe Socialistes à l'Assemblée, Boris Vallaud. "Aujourd'hui, ce n'est pas tant à nous d'aller à M. Lecornu qu'à M. Lecornu de venir à nous. (...) Que comprend-il des propositions que nous avons formulées ?", a poursuivi le député des Landes, qui met en garde : "Sans changement de politique, évidemment les conséquences risquent d'être les mêmes."
"Les Français espéraient le changement, et au fond, Sébastien Lecornu à Matignon, c'est Emmanuel Macron à Matignon. Ils ont tout fait ensemble", a déploré le premier secrétaire du PS, Olivier Faure sur France Info. Il a cependant, lui aussi, refusé d'évoquer une censure a priori, tout en soulignant qu'il n'y aura pas de "chèque en blanc" au gouvernement. "On jugera au cas par cas", a indiqué Olivier Faure, qui a également demandé au nouveau Premier ministre de "renoncer au 49.3". ".Ce serait une démonstration que la méthode change."
"La seule chose qui m'intéresse, c'est de savoir comment nous allons répondre à ce mouvement [du 10 septembre] qui est en cours, ce mouvement qui viendra le 18 septembre à l'appel des grandes centrales syndicales, comment on répondra aux angoisses de ce pays qui est divisé. Si la réponse est positive, je l'accompagnerai, si c'est la même qui est formulée depuis huit ans, alors je censurerai, et nous irons vers une dissolution", a précise le chef de file du Parti socialiste.
Sur France 2, le vice-président du Rassemblement national, Sébastien Chenu, n'a pas adoubé Sébastien Lecornu, sans pour autant le condamner par principe. "On va l'entendre, on va l'écouter, c'est ce qu'on a toujours fait. On n'a pas ce réflexe pavlovien, comme l'extrême gauche, on pense à l'intérêt du pays", a-t-il déclaré.
"On va écouter ce qu'il a à proposer, sans beaucoup d'illusion, toutefois. Nos priorités, sur l'immigration, l'Union européenne, la dépense toxique, sont claires. On va voir si Sébastien Lecornu fait un virage à 180 degrés. En est-il capable ?", s'est interrogé Sébastien Chenu, qui a qualifié le nouveau Premier ministre de "premier et dernier soldat de la Macronie".