L'Assemblée nationale a achevé, samedi 24 mai, l'examen de la proposition de loi relative au "droit à l’aide à mourir". Le vote solennel sur le texte aura lieu ce mardi 27 mai, après les questions au gouvernement, dans l'hémicycle du Palais-Bourbon. La proposition de loi visant à "garantir l’égal accès de tous à l'accompagnement et aux soins palliatifs" fera également l'objet d'un vote ce mardi après-midi. Puis les deux textes seront transmis au Sénat afin de poursuivre leur parcours législatif.
Après huit jours de débats dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, les députés s'apprêtent à voter solennellement, en première lecture, la proposition de loi relative au "droit à l’aide à mourir". Malgré des échanges parfois très clivés sur le fond, faisant appel à des visions antagonistes de l'intrication entre exercice de la liberté individuelle et vocation sociétale, les débats se sont tenus dans une ambiance de relative sérénité.
"Nous avons en grande partie réussi à montrer le meilleur de l'Assemblée nationale", s'est aussi félicité le rapporteur général de la proposition de loi, Olivier Falorni (Les Démocrates), remerciant l'ensemble des députés au dernier jour de l'examen du texte, samedi 24 mai. "Je crois que ce débat nous honore collectivement", a également estimé la ministre de la Santé, Catherine Vautrin.
La proposition de loi indique que le droit à l’aide à mourir "consiste à autoriser et à accompagner une personne qui en a exprimé la demande à recourir à une substance létale, dans les conditions et selon les modalités prévues". Les députés ont longuement débattu des critères d'accès à l'aide à mourir qu'ils ont précisés, et parfois renforcés. Ainsi et en l'étal actuel des choses, les conditions cumulatives permettant d'être éligible à ce droit sont les suivantes :
Si dans le texte, la présence du soignant est requise durant l'absorption de la substance létale, c'est le patient lui-même qui réalise le geste. Une règle qui souffre une exception, si le patient "n’est pas en mesure physiquement d’y procéder". Or en commission, un amendement de La France insoumise avait été adopté afin de supprimer cette mention, laissant le choix au patient entre auto-administration "ou" administration par un médecin ou par un infirmier.
Une modification substantielle à laquelle le gouvernement était opposé. La ministre de la Santé a ainsi présenté un amendement réintroduisant l'expression "lorsqu’elle n’est pas en mesure physiquement d’y procéder". "L’auto-administration, ce n’est pas abandonner le patient puisqu’il est accompagné, surveillé jusqu’au bout. L’intervention du soignant doit être l’exception et justifiée par l’incapacité physique", a estimé la ministre, qui est parvenue à convaincre une majorité de députés malgré l'avis défavorable du rapporteur Olivier Falorni (Les Démocrates) à l'amendement gouvernemental.
L'Assemblée a, en outre, choisi de renforcer la procédure collégiale à l'issue de laquelle le médecin aura à se prononcer sur la demande d'accès à "l'aide à mourir" : le collège professionnel devra être composé "au minimum de deux médecins et d'un soignant" et se réunir "en la présence physique de tous ses membres".
Sur le modèle de la clause de conscience spécifique à l’IVG, les députés ont instauré une clause de conscience pour les médecins et infirmiers susceptibles d'être sollicités par une personne demandant à bénéficier de "l'aide à mourir". Ces professionnels ne seront "pas tenus de participer aux procédures" liées à ce nouveau droit s'ils ne le souhaitent pas, mais devront en informer "sans délai" le patient demandeur. Le médecin ou l'infirmier faisant valoir sa clause de conscience devra ensuite "communiquer le nom de professionnels de santé disposés à participer à cette mise en œuvre".
Les députés ont également approuvé la création d'un délit d'entrave à "l'aide à mourir", puni de deux ans de prison et de 30 000 euros d'amende. Il s'agit par là-même de sanctionner le fait "d’empêcher ou de tenter d’empêcher de pratiquer [l'aide à mourir]", mais aussi le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher, dans un "but dissuasif", une personne de "s’informer sur l’aide à mourir".
Ce mardi 27 mai, les députés se prononceront d'abord sur la proposition de loi portant sur le déploiement et la montée en puissance des soins palliatifs. Puis sur celle visant à créer un "droit à l'aide à mourir". Compte tenu de l'état des forces en présence à l'Assemblée nationale et du déroulement des débats dans l'hémicycle, le premier texte devrait être adopté à l'unanimité, tandis que le deuxième - plus clivant - sera lui aussi approuvé. Les deux propositions de loi seront alors transmises au Sénat afin de poursuivre leur parcours législatif. Bien que l'issue soit plus incertaine au Palais du Luxembourg, le ministre délégué aux Relations avec le Parlement, Patrick Mignola, s'est dit confiant quant à l'hypothèse d'une adoption du texte sur "l'aide à mourir" par le Sénat "à l'automne". Selon toute vraisemblance, la version ne sera cependant pas la même que celle votée au Palais-Bourbon, où la proposition de loi devrait donc revenir en deuxième lecture.