L'examen de la proposition de loi relative "à la réforme de l'audiovisuel public et à la souveraineté audiovisuelle" reprendra mardi 17 juin en commission des affaires culturelles et de l'éducation. Début avril, la discussion de cette réforme controversée, défendue par Rachida Dati, avait été retardée à la suite d'un incident ayant opposé la ministre de la Culture à une fonctionnaire de l'Assemblée nationale, puis reportée en raison de l'embouteillage du calendrier parlementaire.
A la mi-avril, une député de gauche, membre de la commission des Affaires culturelles, en était persuadée : "Vu la ténacité de Rachida Dati, le texte reviendra à un moment ou à un autre avant fin juin !" En mai, la ministre de la Culture ne cachait pas sa "détermination" et affirmait sur France Inter qu'elle ne "renoncerait sûrement pas" à défendre la réforme de l'audiovisuel public. C'est donc officiel depuis quelques jours. La proposition de loi sera examinée à partir du 30 juin dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, soit le tout dernier jour de la session ordinaire, puis lors de la session extraordinaire qui suivra, en juillet.
Avant cela, les discussions reprendront dès ce mardi 17 juin après-midi en commission. Et ce, là où elles s'étaient arrêtées il y a plus de deux mois, faute de temps suffisant pour débattre de l'ensemble des amendements déposés, et après une suspension due à un incident entre Rachida Dati et une fonctionnaire du Palais-Bourbon.
A l'époque, après une première interruption, la présidente de la commission, Fatiha Keloua Hachi (Socialistes), avait dénoncé "des faits graves". "Je n'accepterai jamais que nous puissions manquer de respect à nos administrateurs", avait poursuivi la députée, qui souhaitait que "la ministre reconnaisse son comportement et s'excuse auprès de notre commission". "J'ai vu des communiqués" disant "qu'il y avait eu une agression, qu'il y a eu des menaces, qu'il y a eu des insultes. Elles n'ont jamais existé", avait répliqué la ministre, critiquant en retour l'attitude d'Aurélien Saintoul (La France insoumise).
Finalement, l'examen dans l'hémicycle avait, lui, été reporté - le texte ayant été retiré de l'ordre du jour - en raison d'un débat plus long que prévu sur le projet de loi d'orientation agricole. La proposition de loi, qui a débuté son parcours parlementaire sous la législature précédente et qui a été votée en première lecture au Sénat en avril 2023, avait déjà été repoussée à plusieurs reprises. Par la dissolution, puis par la chute du gouvernement de Michel Barnier à l'automne 2024.
La réforme vise à créer une holding, France Médias, chapeautant France Télévisions, Radio France et l'INA (Institut national de l'audiovisuel), avec une présidence et un conseil d'administration uniques. Selon Rachida Dati, ce rapprochement doit permettre de protéger le service public face aux "groupes privés qui se constituent [et] peuvent être aussi des enjeux d'influence" et de "résister [aux] plateformes par des investissements massifs". "Il faut arrêter de caricaturer cette réforme en disant que c'est une réforme d'extrême droite, voilà la manière dont Madame [Sibyle] Veil [la] présente", avait-elle aussi fustigé, en mai sur France Inter, ciblant la patronne de Radio France.
Accuser les opposants au projet de caricaturer le texte de loi est "un comble venant d'une ministre qui utilise des arguments simplistes et parfois de purs mensonges", avait réagi le SNJ (Syndicat national des journalistes) de Radio France dans un communiqué. "Il est très inquiétant d'entendre Rachida Dati rabaisser les résultats de Radio France et donner libre cours à une rancœur personnelle", avait déploré le syndicat, en appelant la ministre à "retirer" son projet de réforme. Sans succès. "C'est reparti pour un tour", lançait ce jeudi un député d'opposition.
Dans une interview au Monde publiée dimanche 15 juin, à deux jours de la reprise de l'examen du texte en commission, Rachida Dati assure qu'il "ne s'agit pas de démantèlement, ni de privatisation". "Il ne s’agit pas non plus d'opposer France Télévisions et Radio France. Il y a eu beaucoup de désinformation politicienne sur ce sujet, notamment du côté des députés socialistes", lance la ministre de la Culture, pour qui "le statu quo n’est pas une option".
L'un de ses principaux opposants à Rachida Dati, sur ce texte, le député Emmanuel Grégoire (Socialistes) - tous deux s'affronteront peut-être aussi lors des élections municipales à Paris - a écrit à François Bayrou la semaine dernière pour appeler à la "transmission rapide" de l'avis du Conseil d'Etat sur cette réforme et des conclusions de la "mission d'accompagnement" confiée en mars par la ministre à Laurence Bloch, ex-directrice des antennes de Radio France. "Le temps presse. Ce manque de sérieux est une énième insulte à l'encontre de notre service public de l'audiovisuel", estime l'élu dans ce courrier.